Il faisait nuit. Nous étions le 25 janvier, en plein hiver. Vaguement consciente d’une légère fumée vacillante, je me suis réveillée avec une sensation inhabituelle de chaleur dans ma chambre. Complètement étourdie, le visage ruisselant de sang chaud, je me suis traînée en titubant vers la porte de ma chambre. Je suis descendu dans l’entrée à travers la chaleur et les flammes et je suis sortie par la porte d’entrée. J’étais saine et sauve avec pour seule richesse ma vie. J’avais 15 ans. Cette nuit-là, ma vie a basculé.

Trois hommes complètement drogués et intoxiqués avaient pénétré dans notre maison et nous avaient battus, mes parents et moi.

Les intrus avaient aspergé les lits et les murs avec de l’essence et y avaient mis le feu, nous laissant tous pour morts. Mon père et moi avons survécu, mais ma mère est morte sous les coups des assaillants. Les intrus ont été arrêtés. Deux d’entre eux étaient des amis de mon frère et le troisième était mon frère en personne, mon seul frère. Quatorze mois plus tard, ils ont tous les trois été jugés coupables de meurtre au premier degré et condamnés à la prison à vie avec une période de sûreté de 25 ans. Ils ont reçu leur juste sentence par la loi, mais moi aussi j’avais reçu une sentence. Le cours de ma vie avait été modifié. On ne peut jamais comprendre complètement comment et pourquoi les circonstances fabriquent souvent tant de tragédie et de souffrance. C’était la combinaison de la colère, de la jalousie et des drogues qui avaient concocté la potion mortelle chez mon frère et les autres assaillants.

Cette situation, incluant le décès de ma mère, m’a laissée blessée et vulnérable. Il y avait un vide en moi qui aspirait à être comblé. Pendant que je me remettais de mes blessures, j’ai été invitée à un groupe de jeunes dans une église du voisinage. J’ai continué à y aller et au bout d’une année, j’ai proclamé ma foi en Christ. Je voulais à présent vivre pour Dieu et découvrir les plans qu’il avait pour moi.

Je me sentais en sécurité dans cette nouvelle relation avec Christ et je lisais beaucoup la Bible. Un jour, les paroles de Matthieu 6.4 ont happé mon cœur : « Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi. » Je ne pouvais pas croire que Dieu me demande de pardonner à mes agresseurs et surtout à mon frère. Dieu ne savait-il pas le mal qu’ils m’avaient fait et la peine qui en résultait?

Je continuais à nourrir ma peine et à dépenser de l’énergie à haïr mes agresseurs, mais j’ai très vite découvert que la colère et la haine qui m’habitaient me consumaient. J'avais compris que Christ avait donné sa vie pour mes péchés après avoir été lui-même trahi et battu. Il avait souffert et était mort pour moi. Je savais que Dieu m’avait pardonné, et je voulais continuer à être pardonnée. C’est pourquoi je savais que je devais pardonner comme il l'avait fait. J’ai rendu visite à mon frère en prison et j’ai laissé échapper de ma bouche les paroles de pardon, nous libérant ainsi tous les deux. Je lui ai parlé de mon amour pour Jésus. J’avais le pouvoir de lui pardonner et de le libérer parce que Christ m’avait pardonnée et libérée et m'habitait par son Esprit.

J’ai appris que Dieu pardonne instantanément. Mais pour moi, c'était un processus. J’ai su que le pardon était complet le jour où mon cœur a été rempli avec ce que la Bible appelle « la paix qui surpasse tout entendement ».

Treize ans plus tard, j’ai eu l’occasion de manifester ce pardon de manière unique. Ma mère possédait deux bagues dont j’avais hérité. Mais je savais que l’une d’elles était destinée à mon frère. Un jour, j’ai senti que Dieu me pressait de lui offrir cette bague. Je lui en ai donc parlé et je lui ai proposé le saphir bleu de notre mère. Sa réponse est venue droit du cœur. Il a fondu en larmes et m’a dit : « Je ne savais pas que je comptais autant pour toi. » Les larmes coulaient sur mes joues pendant que je lui répondais : « Je t’aime. »

Cette scène me rappelle une autre histoire qui se trouve dans Luc 15.19-22. Jésus utilise là un anneau de famille comme symbole du pardon et de l’amour inconditionnel dans l’histoire d’un rebelle appelé le « fils prodigue », réinstallé dans sa famille. Aucun de nous ne mérite d’être réinstallés dans la famille de Dieu. Mais grâce au sang de Christ versé pour nos péchés, Dieu nous pardonne et nous transforme pour que nous puissions pardonner aux autres à notre tour.


Source de la photo : Chris Karidis sur Unsplash